Si les femmes et personnes non-binaires restent minoritaires dans l’industrie du jeu vidéo, le progrès est en marche. Les personnes de genre minorisés représentent aujourd’hui un peu plus d’un quart des effectifs, et l’industrie semble mettre en place des actions pour atteindre la parité. Cependant, ces efforts restent à renouveler. Explications.

10,6%. C’est la proportion de femmes employées dans les studios de jeu vidéo en 2014. Dix ans plus tard, cette proportion a presque doublé : d’après le rapport annuel 2023 du SNJV, les femmes sont désormais 24% au sein des studios, soit 2 points de plus par rapport à 2020, et 10 points par rapport à 2018. A ce chiffre, s’ajoute, d’après le STJV (2022), 5% des personnes non-binaires. La profession semble donc s’ouvrir aux personnes de genre minorisés et, ainsi, devenir de plus en plus diverse. La diversification de l’industrie se vérifie lorsque l’on regarde les effectifs dans les écoles de jeux vidéos : elles comptent en moyenne 26,7% d’étudiantes (SNJV, 2022), soit légèrement plus que le nombre de femmes en activité dans l’industrie. Si cette statistique est encourageante, elle augure également de la proportion de femmes dans le secteur va, elle aussi, augmenter, à mesure que ces étudiantes trouvent leur place sur le marché de l’emploi.

Pourtant, cette progression n’est pas encore une victoire : sur le marché international, elle ne donne même pas à la France la possibilité de s’octroyer le statut de bon élève. D’après Statista (2014-2021), le marché du jeu vidéo emploie, à l’échelle mondiale, 30% de femmes et 8% de personnes non-binaires – la France accuse donc un léger retard. On note également une possible plus grande précarisation des personnes de genre minorisés sur le marché du travail. Le rapport annuel du STJV note que, chez les freelances, la proportion de femmes (28%) et de personnes non-binaires (7%) est plus importante. Or, le freelancing n’est pas toujours un choix, et peut dans certains cas se révéler plus précaire : 40,5% des sondés du SNJV disent avoir choisi ce statut par nécessité.

« Les trois quart des sondées jugent que l’industrie est peu représentative des femmes. »

Enfin, l’industrie du jeu vidéo souffre encore également d’une assez mauvaise réputation auprès des jeunes femmes allant s’insérer – ou étant récemment insérées – sur le marché de l’emploi. En 2022, le CSA (2022) interroge, pour X-box, 5000 femmes âgées de 16 à 30 ans, dont plus de la moitié (56%) jouent au jeu vidéo quotidiennement. Si 83% de ces jeunes femmes trouvent le secteur du jeu vidéo attractif, et que 36% souhaitent y travailler, le bilan s’assombrit lorsque les femmes sont interrogées sur la place qu’elles pourraient occuper au sein de l’industrie : les trois quarts d’entre elles jugent que l’industrie est peu représentative des femmes. Cette proportion monte encore et atteint 83% des sondées lorsqu’elles sont plus jeunes, et donc plus concernées par des choix d’orientation. Enfin, 66% des sondées pensent que l’industrie emploie encore peu de femmes – et elles n’ont pas tout à fait tort. Si les chiffres du STJV sont une victoire pour le secteur, de l’extérieur, ils signifient seulement que l’industrie ne compte qu’un quart de femmes et que la parité, bien qu’en marche, est loin d’être atteinte.

Cette image est tirée de l’infographie « La place des femmes dans l’écosystème du jeu vidéo – édition 2024 »

« En dehors du secteur privé, les associations et collectifs oeuvrant pour davantage d’intégration sont en plein essor. »

Cependant, on peut noter une véritable bonne volonté de l’industrie et des écoles de jeu vidéo pour diversifier le secteur. Le rapport 2023 du SNJV note que 95% des entreprises du jeu vidéo affirment avoir sensibilisé leurs employé.es à une cause au cours de l’année passée. Parmi ces causes, de nombreuses encouragent la diversité : 65,5% des entreprises ont sensibilisé leurs employés à l’égalité hommes-femmes, 16,8% aux VSST (Violences Sexistes et Sexuelles au Travail) et 9,9% aux questions LGBTQIA+. Mais n’oublions pas que les entreprises sont tenues de respecter l’égalité femme-homme et la non discrimiation dans tout le parcours de carrière : les sensibilisations ne suffisent donc pas. 

Les écoles de jeu vidéo, elles, semblent redoubler d’initiatives pour diversifier leurs effectifs : plus des deux tiers d’entre elles ont mis en place des actions concrètes pour recruter davantage d’étudiantes. Cela peut prendre la forme de boot camp exclusivement féminins, d’interventions dans des collèges/lycées pour inciter les jeunes filles à s’intéresser au secteur, mais aussi via la représentation (parité au sein des jurys, des brochures, des activités proposées aux étudiant.es). 

En dehors du secteur privé, les associations et collectifs de personnes de genres minorisés sont également en plein essor, et œuvrent activement pour multiplier l’intégration de femmes dans le secteur. En dehors de Women in Games, des collectifs tel que Mauvaises Herbes, Afrogameuses ou encore Persos Cachés cherchent à rassembler des personnes de genres minorisés pour les intégrer davantage au sein de l’industrie. Proposant des évènements créatifs, de networking, des rencontres réelles ou virtuelles, ces associations cherchent à créer de véritables réseaux d’entraide et de conseils pour les personnes de genres minorisés. Elles travaillent également à mettre en valeur le parcours de personnes déjà bien implantées dans l’industrie – un point plus crucial qu’il n’y paraît. En effet, une fois encore, la représentation est clef : les jeunes filles sondées par le CSA sont 44% à affirmer qu’une visibilité renforcée sur les parcours de femmes dans l’industrie les aiderait à s’orienter. Pour atteindre la parité, il faudra donc continuer et développer ces efforts, qui sont, depuis dix ans, en bonne voie.

Quelques actions de Women in Games France qui vont en ce sens :

  • Liste d’expertes qui recense les professionnelles qui souhaitent prendre part à des événements (conférences, témoignages métiers etc) afin d’augmenter la représentation des personnes de genre marginalisé auprès d’un large public,

  • Le Guide pédagogique, pratique et juridique sur les Violences sexistes et sexuelles en studio publié en 2023 pose le cadre légal du droit du travail français, liste des définitions et des exemples issus de l’industrie du jeu vidéo, mais aussi des conseils pratiques d’actions et une liste des contacts clés qui peuvent aider en cas de situations de violences sexistes et sexuelles.

  • Notre espace Discord ouvert à toustes qui permet de discuter avec des personnes de la même catégorie de métier et de la même région que vous, d’assister à des conférences boost, d’être au courant de toutes nos actus, de recevoir des feedback sur son CV & portfolio, de recevoir de l’aide communautaire, ou encore du partage d’info de l’industrie,

  • Notre Cycle de conférences et d’ateliers boost! organisé tout au long de l’année pour booster sa carrière et ses compétences. Chaque mois, une conférence et un atelier sont proposés gratuitement en ligne ou en présentiel pour vous aider à booster votre confiance en vous, vos soft skills ou vos hard skills tels que la prise de parole en public ou le pitch de projet.

Cette ressource fait partie d’une série d’articles d’analyse de l’infographie « La place des femmes dans l’écosystème du jeu vidéo – édition 2024 » qui documente l’évolution de la mixité dans le jeu vidéo de 2021 à 2024. La première infographie documente son évolution de 2014 à 2020.