Si vous souhaitez devenir Game Designer, ou si ce domaine vous intéresse, vous êtes au bon endroit ! Cet article synthétise les questions & réponses posées lors du Q&A du 24 février dernier organisé sur le serveur Discord de Women in Games France.
Merci à nos deux intervenantes Marine Lemaitre Freland (CEO à Piece of Cake Studios) et Morgane Lainard (Game Designer pour le CCCP).
SOMMAIRE
- Portraits
- Tâches types
- Journée type
- “Vous est-il arrivé de prendre de mauvaises décisions ?”
- “Qu’est-ce qui vous plaît le moins et qui vous plaît le plus dans ce métier ?”
- “Est-ce difficile de trouver du travail dans cette branche ?”
- “Que faut-il faire pour d’intégrer de gros studios en sortie d’étude ?”
- “Qu’attend-on d’un porfolio de junior ou d’une personne qui entre dans l’industrie ?”
- “Que permet le métier de Game Designer en termes d’évolution ?”
- “Est-il possible de faire Game Designer sans étude dans le jeu vidéo ?”
- “Quelles sont vos ambitions dans l’industrie du JV ?”
- “Quels seraient vos conseils en terme de networking ?”
- “Conditions de travail : avez-vous eu des périodes de crunch ?”
- “Est-ce que connaître des types différents de jeux vous aide pour votre métier ?”
- “Est-il difficile d’être une femme Game Designer ?”
Portraits
Morgane L. : Game Designer depuis bientôt 11 ans, travaille au sein du studio CCCP sur des jeux traditionnels et des serious games. Est également enseignante. Son cursus n’est pas traditionnel : communication, sociologie, licence professionnelle game design puis emploi juste après le stage.
Marine L. F. : Travaille depuis 14 ans, sort d’une école de jeux vidéo et s’est formé en gestion de projet et game design. S’est spécialisée dans la gestion de projet et a créé son studio sur Paris il y a 5 ans.
Tâches types
Marine : Le Game Design encadre un large panel de métiers. Ça peut aller de l’économie au business model en passant par le level design. Ça dépend du type de projet et de l’équipe. Tous les Game designers n’ont pas les mêmes affinités.
Morgane : Plus une équipe est grande, plus les tâches sont restreintes. Dans une petite équipe, on peut faire de l’écriture, du scénario, et réaliser tout le cahier des charges du jeu.
Journée type
Marine : Le·a Game designer prend les idées de tout le monde, ce qui importe, c’est de quelle façon il·elle les intègre dans le projet : c’est un travail d’équipe. Il·elle a pour rôle de condenser le tout et de le rendre harmonieux. En journée, le·a Game designer peut travailler sur des scènes, des quêtes ou encore sur des sujets spécifiques de type “que va être le reward du joueur et à quel moment”. Il·elle répètera les boucles de gameplay à plusieurs scènes spécifiques pour s’assurer que ce soit ok.
Morgane : J’ajoute qu’il y a un très gros travail de recherche dans la pré-production : de référence, de sujets (histoire, environnement, etc.). Il faut bien connaître son sujet pour ensuite le retransmettre à toute l’équipe.
-> Le·a Game Designer ne doit pas avoir peur de jeter et de refaire, il faut parfois s’habituer à faire le deuil de certaines idées. Deux idées séparées peuvent être très bien, mais peuvent ne pas marcher ensemble. Il faut alors chercher d’autres solutions. Il y a beaucoup d’allers et de retours sur la production.
“Vous est-il arrivé de prendre de mauvaises décisions ?”
Morgane : Un·e bon·ne Game Designer se trompe dans 70% des cas. Un·e mauvais·e dans 90% des cas, mais ça arrive assez régulièrement dans tous les cas.
Marine : Il n’y a pas de mauvaise décision : on teste, on voit ce que ça donne, si c’est fun ou non, on voit comment l’améliorer, et on fait faire des tests pour voir ce que les gens en pensent.
“Qu’est-ce qui vous plaît le plus dans ce métier ?”
Morgane : Ce que j’aime, c’est que c’est très varié dans le serious game et que je peux toucher à beaucoup de choses vu que je suis dans une petite équipe (3 à 6 personnes maximum). Mes journées ne se ressemblent jamais.
“Est-ce difficile de trouver du travail dans cette branche ?”
Marine : Ce n’est pas forcément difficile mais il y a beaucoup de monde sur le marché. En tant que directrice, je reçois beaucoup de CV de jeunes qui sortent d’école. Il y a de réels besoins mais ce qui est compliqué c’est que le métier de Game Designer est en fait un panel de sous-métiers. On aura des CV orientés sur des points spécifiques et d’autres plus généralistes. Selon les studios visés, on peut trouver une place.
Morgane : Il ne faut pas avoir peur d’aller à l’international ou d’aller dans d’autres rôles de production surtout si on vise le marché français. Il faut soit être polyvalent, soit avoir une spécialité et savoir la mettre en valeur.
“Que faut-il faire pour intégrer de gros studios en sortie d’étude ?”
Morgane : Il y a parfois plus de facilités pour entrer dans les studios selon les écoles, comme avec l’ENJMIN. Il peut être plus facile de trouver un métier lorsqu’on passe par un stage.
Marine : Je rejoins Morgane, il y a des formations plus valorisées que d’autres. C’est une industrie qui est encore petite, tout le monde connaît tout le monde. Ce qui peut être positif comme négatif selon nos actions et notre travail. Les premiers stages sont assez marquants par rapport à votre carrière. Par exemple, si vous faire un premier stage sur un jeu de voiture, vous partez potentiellement sur une carrière dans les jeux de voiture, idem pour le mobile).
“Qu’attend-on d’un porfolio de junior ou d’une personne qui entre dans l’industrie ?”
Marine : Il faut optimiser son temps d’école, participer à des game jam, mettre en avant ce qui a été fait sur les projets, de quelle façon ça a été réfléchi, quels outils ont été utilisés.
Morgane : En fonction du poste visé, ça peut être intéressant de montrer des blogposts d’analyse – si vous vous rapprochez de l’UX notamment.
On demande toujours un book de réalisation, ce qui est conseillé c’est de montrer vos documents et jeux liés aux game jam par exemple, ça peut faire la différence.
“Que permet le métier de Game Designer en termes d’évolution ?”
Marine : Le chemin classique est de se spécialiser dans quelque chose ou être lead d’une branche, mais rien n’est rigide. Selon les spécialités, on peut devenir directeur·rice artistique ou partir dans le level design, créer son studio, etc. Pour ma part, je me suis orientée en gestion de projet et j’ai eu envie de créer mon studio.
“Est-il possible de faire Game Designer sans étude dans le jeu vidéo ?”
Morgane : Pour avoir eu un collègue de promo qui avait 45 ans et j’ai l’impression que c’est difficile à moins de vraiment montrer que toute l’expérience qu’on a eu jusqu’à maintenant apporte quelque chose. Dans tous les cas, il faut toujours valoriser tout ce qu’on a fait jusqu’à maintenant.
Marine : J’ai vu beaucoup de profils atypiques (boucherie, métiers improbables). Ce qui est important en game design, c’est d’avoir un esprit atypique et de savoir communiquer. Il est important de savoir comment bien mettre en avant son CV.
“Quelles sont vos ambitions dans l’industrie du JV ?”
Marine : Sortir de nouveaux projets !
Morgane : Sortir des jeux dont je suis fière, voir les joueurs et joueuses ravi·e·s et discuter du jeu. Je voudrais aussi que les jeux soient de plus en plus accessibles à un large public et raconter des histoires moins courantes que les jeux traditionnels.
“Quels seraient vos conseils pour se faire connaître / en networking ?”
Marine : Il est important de partager, d’échanger sur un sujet, mais il ne faut pas que ça soit forcé/lourd/hors contexte.
Morgane : Il faut que ça reste naturel et humble. Il ne faut pas essayer de vendre un truc sinon ça va gonfler tout le monde. Venir, se présenter et écouter les autres suffit.
Il y a des clusters dans presque toutes les régions de France. Rapprochez-vous de ces associations, elles permettent de faire vivre les studios de la région.
“Conditions de travail : avez-vous eu des périodes de crunch ?”
Marine : Dans tous les studios avec lesquels j’ai travaillé, il y a eu des périodes de crunch mais pas imposées.
Morgane : Pareil, ces périodes sont fortement conseillées et il n’y avait pas trop le choix : il fallait finir le jeu. C’est surtout concentré juste avant les rendus, un peu comme quand on est à l’école.
Marine : Ce n’est pas forcément une mauvaise gestion du studio, le jeu est un produit culturel qui est dur à timer. Cependant il y a eu un réel éveil sur le sujet dernièrement, cela se fait de moins en moins.
“Est-ce que connaître des types différents de jeux vous aide pour votre métier ?”
Morgane : Il ne faut pas s’enfermer dans le jeu vidéo lorsqu’on est Game Designer. Il faut se nourrir de tout.
Marine : Je joue beaucoup aux jeux de plateaux et de cartes, il faut être curieu·x·se pour explorer des choses qui ne sont pas dans notre zone de confort. Ne pas avoir de préjugés, tester un peu de tout.
Morgane : En tant que Game Designer, vous allez devoir apprendre à aimer des jeux que vous n’aimiez pas, des jeux “de fille” ou d’équitation par exemple.
Marine : Il est important de se demander pourquoi certains jeux fonctionnent.
“Est-il difficile d’être une femme Game Designer ?”
Marine : Je n’ai jamais rencontré de problèmes particuliers de toute mon expérience professionnelle par rapport à mon genre et ce n’est malheureusement pas le cas de tout le monde.
Morgane : J’en ai eu surtout en début de carrière avant CCCP. On m’a très clairement dit qu’on m’a pris parce qu’on faisait des jeux “de fille” et on ne m’écoutait pas. Maintenant ça peut arriver mais c’est surtout lié à des clients et la boîte dans laquelle je travaille prend les choses en main.